jeudi 30 mars 2017

Autre leçon en passant : le jardin est à l'image de son jardinier

Le Jardinier creuse la terre, l'ensemence et l'abreuve. Il soigne son labeur et aussi patiente. Sais-tu que le jardinier apprend au travers de ses actes, les gestes qui sauront préserver son travail ? Il observe la nature telle qu'elle s'offre à lui et lui fait don en retour de son savoir. En un mutuel respect, ils deviennent utiles l'un pour l'autre. Ils sont aussi dépendants l'un de l'autre. Car la main du jardinier soigne la terre et la terre donne. L'homme plein d'humilité va secourir celle-ci contre les intempéries et toutes les autres sortes de nuisance. Il va cultiver son jardin.

L'homme qui pense, soigne son esprit, lui procure de la bonne et saine nourriture, le défend de tous les parasites... L'homme qui pense, patiente aussi, car il sait que les idées viennent lorsque l'on leur donne le temps de venir, et surtout lorsque l'on prend la peine de les accueillir. Le jardinier scrute l'horizon, cherche d'où vient le vent, respire la terre, observe le grain. Le grain n'est qu'une étape, car le grain donne à la fois, les racines et la pousse. Penche-toi sur ce miracle et médite.

Comment le grain donne-t-il à la fois des racines et comment donne-t-il la tige ? Une fois que tu t'étonneras de ce miracle, dis-toi alors que le grain mis en terre, abreuvé de son eau, donne toujours à la fois des racines et une pousse.

Quand en ton esprit aura germé la semence, sache qu'elle aussi sera à te dévoiler des racines et te manifestera la force de son élan.
Entretiens-la, et veille à ce que cette pousse soit cultivée de la meilleur façon. Plus tu visiteras ton jardin, plus tu seras à le cultiver, et plus tu verras à quoi ressemble le jardinier.
L'assurance vient de ta croyance, et la force vient de ta foi.
Qui donne reçoit.
Or, le premier don est le don de soi.
Médite, car méditer c'est se donner le temps de méditer.
Comprends-bien.

Océan sans rivage

Leçon en passant ou introduction à la réflexion



Apprends que le sage se tait quand on lui demande de parler.
Le silence est une éloquence que peu savent percevoir.
Si tu veux écouter, écoute-toi en premier.
Le sage fuit la foule quand celle-ci le demande et il poursuit son chemin quand on veut l'arrêter.
Comprends-bien, mon Ami.
Il tient sa langue de crainte d'en dire trop.
Il refuse les ovations et les acclamations, ennemies de sa modestie, dangereuses pour son âme, car l'orgueil y séjourne et s'accroît très rapidement. Cependant, le sage est courageux et déterminé et ne faiblit pas devant les difficultés. Il ne montre pas sa science, car la science est toute en lui. Lorsqu'il donne, ce n'est pas au nom de La Connaissance, mais toujours en vue de Son seigneur. Voilà toute la différence avec les verbiages inutiles. Le Don est dans L'Acte, et l'humilité dans l'abstinence.
Penses-tu que le Sage n'existe pas ?
Peut-être, mais ceci est une Leçon pour toi.

Océan sans rivage

Extérieur et Intérieur - Histoire d'une âme



Il est dit qu'un jour, nous serons à percer l’Écorce pour parvenir au Noyau.
Je savais que ce monde n'était pas celui que l'on croit.
Mes yeux se heurtent à la paroi de l'ignorance.
Je cherche donc.
Peut-être se cherche-t-il en moi ?
Lui aussi se cogne à ma propre indigence.
Sois indigente !
Je marche, mais ne sais pas où aller.
Il est une intention.
Est-elle une flèche ?
Je l'ai sentie m'atteindre.
Il est dit, que partout, les yeux se heurtent à l'évidence.
La Lumière semble comme me maintenir en cette somnolence.
Alors, je commence à chercher dans tous les sens.
Je visite les quatre points cardinaux.
Sais-tu ?
Mon oreille s'éveille des discours en ces Cieux.
Je dis : faites donc silence !
J'ai alimenté le four de L'Alchimie.
J'ai porté une braise.
Puis, j'ai couru dans la Vallée des embrasements.
Il m'y a emmenée de force.
Maintes stratégies du Puissant Amant.
Cette chaleur a les vertus d'un combustible.
Voici que les yeux ne sont plus les yeux du visible.
Le Noyau s'est fendu et tous Les Mondes sont à faire Révérence.
Il n'est plus ni intérieur, ni extérieur.
Es-tu Celui qui installe Ta Demeure en cette Circonférence ?
Lors, La Vie se stabilise en ce monde et en L'Autre.
La passerelle est cette Ligne droite. 
Seigneur, fais-nous avancer en ce chemin comme filent le vent et les mille cavaliers !
J'ai vu ces coursiers dévaler les plaines.
C'est avec eux que je me retrouve à rejoindre La Destinée.

Océan sans rivage


Voir aussi sur Noblesse et Art de l'écu

Blason de Wallenhorst (Basse-Saxe, Allemagne)

Escale 2


Vue de Kenadsa


J'ai peine à dormir. Le désert nous tient en éveil par sa vastitude.
Je soulève la tête et d'un regard je balaye le campement.
Michel et Jean-Marie se sont endormis sur leur couche.
Notre guide, Omar, est lui-même encore éveillé.
Il me fait un signe pour me dire de me reposer.
Les étoiles clignent, imperturbables.
Je finis par m'endormir.
Les premiers rayons de soleil nous réchauffent très vite.
Je me sens engourdi.
Nous reprenons la route après une collation.

Les questions sont presque imperceptibles.
Je ne sais plus penser.
La fatigue enveloppe mon esprit.
Nous arrivons à Kenadsa.
Nous voici gauches.
On nous reçoit avec beaucoup de déférence.
Un hôte est sacré.
Nous sommes noyés au sein des mouriddines, les aspirants.
Mes sensations sont exacerbées. Tout est effervescence. Tout se résume à une chose: comprendre, se comprendre.
Pourtant, nous ne savons pas vraiment formuler les questions.
Nous les savons en nous, nous savons que nous sommes à la bonne place, mais nous ne savons pas pourquoi.

Le soir même nous assistons à une "envolée" de prières et de litanies.
Le cœur est baigné de lumière.
Le Dhikr opère en une sorte de contraction et aussi en une réelle dilatation.
Les paroles sacrées ont le pouvoir d'aller très en profondeur et d'agir au delà du mental.
Il n'y a plus de place pour la raison.
Ni même pour la pensée. Tout semble se dissoudre.
Chaque balancement du corps nous donne à respirer au temps du souffle éternel.
Ces séances agissent sur les points subtils que recèlent nos canaux d'énergie.
Les vibrations enclenchent une sorte d'échauffement et l'on se sent envahi par une extrême douceur.
Ces vibrations nous parlent depuis le fond des âges.
Elles plongent si loin que nous ne savons plus rien.
Nous sommes en cette unité plénière.
Nous sommes comme effacés.
Nous sommes aussi à vivre la réalité du moment.
Après chaque séance, nous flottons.
Bien plus tard, j'ai compris que cette énergie est vivante et fait reculer notre ignorance.
Elle vient de l'origine.
Elle descend comme une amie bienfaisante et nous ouvre la porte de la conscience.
Elle nous offre cette opportunité de nous extirper des limbes de nos souffrances psychiques et de nous amener vers ce qui est caché. Car nous ne sommes certainement pas ces pulsions élémentaires, quand bien même cela nous apparaîtrait comme prodigieusement logique.
La logique est réduite à ce qui la motive, mais ne donne pas accès aux autres plans.
Nous ne savons pas que cette réalité est cachée et qu'elle est ce que nous sommes.
Tant que les voiles ne s'écartent pas, nous ne savons pas.
Sans doute, nous faut-il une vie entière pour saisir que la vie est une évolution vers une suprême Conscience.

C'est dans le désert que j'ai réalisé que j'étais seul face à Lui.
Le silence est presque étouffant.
La chaleur accablante.
Nous sommes harassés, mais nous sommes bien.
Nous ne comprenons pas ce qui se dit, mais nous nous laissons vibrer.
Michel sourit souvent.
Jean-Marie est rouge et transpire. Il m'avoue qu'il souffre terriblement de la température élevée.
Il passe son temps à s'éponger. Il souffle sans cesse et provoque l'hilarité de certains.
Dans le désert, le rapport à l'eau est une occupation constante. Nous n'avons pas idée combien c'est si facile pour nous d'ouvrir un robinet et de laisser l'eau couler comme une grande évidence. Michel, Jean-Marie, et moi avons dû nous adapter à la vie dans le désert. Je crois que ce fut la chose la plus difficile qui soit. Aujourd'hui, j'en ris. Nous étions très novices.
La vie sans confort est une leçon de vie, et nous donne à nous regarder de plus près.
Nous sommes "nous" plus que jamais.
Je veux dire, que nous sommes "nous" sans fioriture...
Mais, nous ne le savons pas non plus.
Il faut du temps pour se voir !

Philippe Safar

dimanche 26 mars 2017

Escale 1


Peinture de Roland Ballereau


Nous sommes quatre dans le désert.
Ce sont des amis de longue date.
Nous avons un seul objectif : retrouver ce lieu qu'on nous a indiqué.
Nous sommes très fiévreux, presque inquiets. D'habitude, nous sommes à débattre vivement de choses et d'autres.
La chaleur est oppressante. Nous avons soif, mais osons à peine puiser dans les réserves.
Nos lèvres sont asséchées. Je me sens en unité avec chacun de mes amis.
Pourtant, je ne sais pas. Un vent brûlant nous rend comme hypnotisés.
Le guide conduit très vite la land rover. Il rit souvent en nous racontant des anecdotes du désert. Ses dents tranchent avec son teint buriné. Il est surpris de voir quatre français musulmans.
Nous nous arrêtons pour faire nos ablutions et nous prions.
Le sable épouse nos gestes.
Le ciel est librement ouvert à nos oraisons.
La nuit va tomber.
Notre guide décide d'installer le bivouac.
Il a des mouvements précis.
Il allume un feu et commence par préparer le pain.
Michel l'aide à élaborer un repas frugal.
De la viande séchée, une portion d'orge cuite et du pain.
Le thé est presque noir.
Pourquoi nous sommes-nous retrouvés dans ce désert d’Algérie?
Nous allons visiter une confrérie de soufis.
La vie est rude et les cœurs sont tendres.
Une oasis d'amour.

Une discipline sans complaisance.
Mais sommes-nous à la recherche du confort?

Tout a commencé dans ce petit studio parisien.
Nous sommes un groupe d'étudiants et nous veillons si tard que nous ne savons plus si la nuit commence, ou bien si c'est le jour.
Nous parlons de philosophie, du sens de l'existence, du vide du monde.
Nous sommes juste à nous emporter.
Des fous!
De quoi parlons-nous encore?
De La Tradition. De René Guénon. Des voies de Sagesse.
Nous assistons parfois à des séances de Dhikr. C'est Hassen qui nous y amène.
La première fois que j'y vais, je n'ai plus aucun doute.
C'est là que je me sens bien.
Cherché-je les sensations du mystère?
C'est possible.
Pourtant, le mystère se cherche en moi.
La voix est forte. Elle est même puissante.
On est conquis ou on ne l'est pas.
Ça ne se passe jamais dans l'hésitation.
Le cœur cogne très fort.
Nous étions jeunes. Nous étions près à tout pour trouver cette voie de délivrance.
Nous sommes en route.
Le désert nous ouvre les bras. Il accueille nos questions, notre désir de ne plus nous perdre, de ne pas nous perdre.
Il occulte les réponses, mais nous sommes prêts à aller jusqu'au bout du monde pour nous trouver.
Rencontrer ce qui nous cherche. A ce moment-là, nous ne le savons pas. Au fond, nous ne savons rien. Nous allons.
C'est la première escale d'un long périple...


Philippe Safar

Préambule à ce blog


Photographie de Don Hong-Oai


Sur les Eaux où se vient murmurer L'Onde du Souffle presque imperceptible,
Il est en toi la seule Réalité possible.
Elle est pure et jaillissante.
Elle glisse en ces lignes devenues ton scribe.
Est-il encore une seule raison, lors que Le Roi fait Son Apparition ?
Sa Descente imminente est semblable à un effluve que parent de mille Grâces les pudeurs de Sa Majesté.
En Son Amour est un Secret et c'est en L’Éclosion des feuillets d'un Livre Immaculé que s'active Le Calame de L'Êtreté.
Nul ne se pourra plus jamais occulter La Lumière qui se poursuit en Sa Perpétuelle Consécration.
Ecoute La Présence en L'Effacement et ne fais plus de bruit.
Il est Là.

Océan sans rivage